[Focus] L'étonnant système de recrutement des jeunes diplômés au Japon

Mis à jour le  30 avril 2019

[Focus] L'étonnant système de recrutement des jeunes diplômés au Japon

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Sommaire :

« Recruit Rhapsody » (2012) par Maho Yoshida :

Tout le monde a mis son costume noir et feuillette son  « Comment trouver son premier job ? », avec son plus grand sourire devant les recruteurs, en se battant avec les autres candidats - mais toujours en gardant le sourire -, s'affairant à masquer sa personnalité… Toutes ces choses que raconte cette vidéo sont-elles spécifiquement japonaises ?

Système japonais spécifique

La recherche japonaise du premier emploi est unique en son genre à l’échelle mondiale. Chaque année au Japon, les entreprises embauchent les futurs diplômés en masse. Du fait de cette systématisation, tous les étudiants effectuent la même démarche tous en même temps. La période de la recherche dure quelques mois entre les troisième et quatrième  années d’étude. Cette période est définie officiellement par les autorités japonaises. Pour cette année 2015, elle vient tout juste de commencer au 1er mars.

Lors de la première étape, les étudiants assistent aux séances d’informations organisées par les sociétés. En même temps, ils envoient le dossier pour la première sélection, qui s’appelle « Entry Seat ». Dans la plupart de cas ce dossier contient un CV et une lettre de motivation. Selon l’enquête du journal Nikkei nabi, plus de 50% des sociétés en reçoivent plus de 10 000 candidatures. Ensuite, viennent les examens écrits puis les entretiens. Les examens écrits sont souvent « connaissances générales » et « SPI (Synthetic Personality Inventory) ». - Les connaissances générales sont structurées autour de cinq matières niveau Bac: japonais, mathématique, science, science sociale et anglais, et aussi par l’actualité et la culture. - SPI comporte deux parties : l’une examine la personnalité, l’autre s’assimile à un test de type QI.

Les entretiens peuvent être au nombre de trois ou quatre. Plusieurs formes sont possibles : discussion en groupe, entretien en présence du groupe, entretien individuel ou exposé oral. À la fin, si tout marche bien, le contrat du travail est signé en octobre au plus tard. Pour ceux qui se sont engagés dans le processus depuis le 1er mars, ils débuteront leur carrière en avril 2016, qui correspond au nouvel an japonais.

Différence des systèmes entre la France et le Japon

En France, le premier emploi se trouve dans le prolongement des stages. Autrement dit, les compétences acquises lors des premiers expériences sont considérées comme importantes même pour quelqu’un qui n’est encore qu’un tout jeune diplômé. Au contraire, les sociétés japonaises jugent les étudiants par leur « potentiel » ou marge de développement. Ce que ce mot indique précisément dépend des sociétés mais en grossièrement ce sont la personnalité, l'esprit d'équipe et la motivation.

Les futurs diplômés au Japon sont souvent comparés à du « papier blanc ». Les sociétés considèrent que « la possibilité de donner une teinte à du papier blanc » représente un avantage pour l’entreprise. Sans doute, l’organisation du travail au Japon, qui fait qu’un emploi est encore traditionnellement choisi à vie, confère une valeur aux étudiants qui n’ont pas d’expérience. Dans ce système, la formation de ces jeunes diplômés n’est pas un investissement coûteux pour les sociétés. Ainsi, les deux trois premières années sont considérées comme période de formation.

Avantages et désavantages de ce système

Du point de vue des étudiants, un avantage important de ce système est qu’ils n’ont pas besoin d’entrer en concurrence avec les professionnels. En revanche, il est important de trouver un emploi pendant que l’on est encore « étudiant ». Cette embauche collective cible les « futurs diplômés » exclusivement. Une fois sorti de l’université, en se trouvant hors de ce système, la recherche devient compliquée et plus le temps passe, plus la pression est difficile.

« Crazy culture in Japan » ou « pareil à travers le monde » ?

Aux yeux d’observateurs extérieurs, ce système japonais est souvent perçu comme comportant des règles très strictes. Si on prend la tenue vestimentaire comme exemple, il est défini dans ces moindres détails : combien de boutons pour la veste, à partir de quelle longueur il faut attacher les cheveux, etc. (How do female japanese students prepare for job hunting). 

Ils définissent le système japonais en utilisant ce type de vocabulaire : stressant, enfer, cauchemar, suicidaire, etc. Pour les japonais aussi, certains étudiants voient ce genre de règles comme "l’imposition excessive d’une norme". Ils peuvent ressentir que cette uniformisation les prive de leur propre personnalité. C’est le sentiment que la vidéo « Recruit Rhapsody » souligne.

Bien que cette vidéo traite d’un sujet typiquement japonais, elle a attiré la sympathie d'étudiants étrangers: « It’s like it here in the West too… » En tenant compte de la particularité notable du système japonais, cette réaction est intéressante. Peut-être existe-t-il un conflit commun auquel tous les futurs diplômés dans le monde doivent se confronter et ce quel que soit le système.

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