Est-ce si difficile de changer de métier quand on débute sa carrière ?

Mis à jour le  23 avril 2019

Est-ce si difficile de changer de métier quand on débute sa carrière ?

9cf18adf-aa2f-403f-afe2-327677031e66.png

Exit le contrat moral garantissant l’emploi à vie, la carrière planifiée contre un attachement sans faille à l’employeur et la cohérence obligatoire des études avec l’expérience terrain. À l’heure où le monde du travail mute en permanence, chahuté par la conjoncture économique défavorable, les nouveaux besoins des entreprises, les métiers innovants et l’essor des pratiques liées au numérique, la génération actuelle, en quête de sens permanent, ne se repose plus seulement sur ses diplômes !

Les parcours professionnels tendent à devenir de plus en plus individualistes et diversifiés. Les changements de carrière sont devenus monnaie courante. Rappelons que plus d’un actif sur 2 a changé d’orientation professionnelle en 2012 (56% selon une étude de l’AFPA). Mais prendre un nouveau virage ne se fait pas par hasard : une rencontre fructueuse, un entretien imprévu, une expérience surprenante… Il suffit de peu aujourd’hui pour s’aventurer hors du champ de compétences fixées par la théorie et d’envisager une reconversion à peine sortie des bancs de l’école ou de la fac.

D’ailleurs les supports mis à disposition pour trouver un emploi se sont multipliés comme l’indique une étude de RegionsJob : sites d’offres d’emploi et corporate, salons, plateformes sociales ou encore réseau personnel. Sans surprise, ces outils permettent d’affirmer qu’aujourd’hui, un individu sera amené à changer en moyenne trois fois de métiers et travaillera dans cinq entreprises différentes. Une question reste alors en suspens :

Lorsque nous ne sommes pas tout à fait expérimentés, est-ce réellement un risque de changer de métier ?

Plus difficile encore : d’appréhender un milieu qui nous était jusqu’alors totalement inconnu et pour lequel nous n’avions aucun bagage au préalable mais en lien avec sa véritable vocation ? Ornella, 26 ans, a voulu croire à cette nouvelle chance qui se présentait à elle. Retour sur un parcours riche gravitant autour de son penchant premier : l’Art. Hello Ornella, peux-tu me raconter ton parcours étudiant jusqu’à maintenant ?

J’ai évolué dans un milieu aisé (parents orthodontiste et psychothérapeute). Mes parents, tous deux amateurs d’Art en général (photographes en parallèle de leur métier initial et passionnés également de dessin, peinture et sculpture) m’ont transmis leur amour pour cet univers. Une fois mon BAC « Economie et Social » option Arts Plastiques obtenu, j’ai quitté ma Drôme natale pour rejoindre la capitale. Influencée par le milieu artistique,  j’ai décidé d’y effectuer mes études supérieures dans une école d’Art spécialisée où après cinq ans, j’ai obtenu mon Master 2 « Restauration et conservation d’œuvres d’art spécialité céramique ».

À cette époque, je me voyais travailler sur des sites archéologiques ou centres d’archéologie.

Quels ont été par la suite tes débuts dans le monde professionnel et tes premières expériences significatives ? two white motorboats near body of water

J’ai trouvé une mission de restauration et conservation sur l’île de Thasos, pour le musée archéologique, en partenariat avec l’Ecole Française d’Athènes. Pendant 3 ans, j’ai pu découvrir la Grèce, un pays qui me tenait à cœur plus en profondeur, une expérience enrichissante en continuité avec mes études. Cependant, je me suis vite rendue compte que la gestion d’un atelier, c’est surtout un travail solitaire sauf si l’on est deux. Même si je n’ai pas connu de freins ou de déceptions particulières, le travail d’équipe me manquait. Après un petit temps de réflexion, c’était décidé : je ne souhaitais pas faire de la restauration de céramique mon activité professionnelle principale, d’autant plus que ce secteur très spécialisé est assez restreint et les profils convoités ont acquis généralement pas mal d’expériences auparavant et sont davantage mobiles. Finalement, mon cœur chavirait : j’éprouvais à la fois le désir fort de suivre mon fil d’Ariane en gardant un pied dans le monde de l’Art et de découvrir autre chose après mes 5 années d’études, un autre métier où les perspectives d’évolution se dessinaient plus nettement et rapidement.

À la suite de ta réflexion, as-tu mis en place des démarches particulières ? Avais-tu des contacts qui pouvaient t’aider dans tes recherches ? Contact scrable

Comme une majorité de jeunes diplômés, je pense qu’à l’heure actuelle, il est primordial de se créer un réseau de contacts influents pour obtenir des perspectives professionnelles intéressantes.

Pour ma part, c’est une amie qui m’a contactée, son poste d’assistante commerciale et responsables des relations publiques au magazine Connaissance des Arts (groupe Les Echos) se libérait car elle avait de son côté trouvé un autre poste. Cette opportunité m’a enchantée puisque le métier restait en lien avec mon domaine de prédilection et par la même occasion, me faisait découvrir le milieu de la presse qui m’était jusqu’alors totalement inconnu ! Après 2 entretiens avec les RH et la Direction, j’ai signé mon premier CDD. De quelle façon as-tu perçu et mesuré les risques professionnels et personnels concernant ce changement de poste ? As-tu pris en compte la cohérence avec ton parcours effectué auparavant ?

De mon point de vue, la situation était assez cohérente puisque depuis 3 ans, j’évoluais dans le monde de l’Art, mais toujours à des postes différents. J’y ai développé ma polyvalence, mon adaptabilité et mes connaissances. De par mon tempérament, appréhender un nouveau milieu ne me faisait pas peur, j’y ai vu là l’opportunité de compléter finalement le panel de mes compétences. En outre, le soutien de mon entourage a été relativement important dans ma prise de décision.

Quelles ont été les premières missions que l’on t’a confié et ton ressenti par rapport à ces dernières ? Pour la plupart, il s’agissait de missions commerciales et de relations publiques (prospection sur différents salons, proposition d’offres, gestion d’un portefeuille clients, veille concurrentielle...). Il m’a certes fallu un temps d’adaptation pour comprendre les mécanismes commerciaux puisque j’étais novice en la matière, mais ce dernier fut relativement court. La diversité des tâches était telle que je n’ai pas eu le temps de m’ennuyer et j’ai dû me former rapidement aux procédures de l’entreprise. J’ai appris ce qu’était une structure hiérarchiquement organisée, mais aussi les avantages et les contraintes qui en découlaient.

As-tu évolué depuis ou occupé d’autres postes depuis cette expérience au sein d’un groupe de presse ?  Toujours au sein du groupe Les Echos, mes missions ont évolué vers la publicité (commercialisation d’espaces publicitaires, prises de contact avec divers annonceurs et suivi du CA de 8 commerciaux.) Pendant un peu plus d’un an, je me suis forgée un tempérament adapté à la relation client, un aspect de ma personnalité qui m’était finalement étranger auparavant. Cette expérience m’a permise d’en arriver au poste que j’occupe aujourd’hui : Chef de publicité pour le magazine Le Monde. Je travaille toujours au service commercial et suis responsable des Petites Annonces. 

J’ai appris alors ce qu’était le travail en mode projet. Par ailleurs, le travail d’une assistante commerciale ne m’échappe pas puisque je suis en charge de l’administration et de la facturation, ce sont de nouvelles tâches répétitives mais au combien formatrices. À partir de septembre, je m’occuperai également du Guide Saint-Christophe (sorte de Routard de lieu de repos, abbayes et vacances...) Une reconnaissance de la part de mes paires qui me satisfait pleinement.

Quelle évolution ! ton champs de responsabilité s’est considérablement élargi alors ? Oui, c’est le moins que l’on puisse dire, entre création de devis, fixation des tarifs et de remises, j’ai la main libre sur des décisions stratégiques d’importance dans ma BU (Business Unit.) La prospection et tout le travail de recherches indispensable en amont me plaît également beaucoup. Je me suis découverte en véritable partenaire du business, car atteindre les objectifs, me challenger et apporter une contribution financière utile à mon entreprise sont mes principaux leviers de motivation au travail aujourd’hui.

Cependant au niveau des compétences demandées, as-tu rencontré des difficultés ou une formation s’est-elle imposée ? Pas spécialement, puisque d’une entreprise de presse à une autre, les process se rejoignent dans l’ensemble. Bien sûr chacun à sa façon de faire, de diriger mais le principe reste similaire. La vision « grand groupe » m’a permis d’être davantage orientée vers le business. J’avoue qu’aujourd’hui ma formation initiale ne me sert plus à grand-chose si ce n’est ma connaissance du milieu de l’Art et de ses acteurs qui m’apporte une double compétence. Ainsi je peux développer plus facilement la publicité culture sur les supports pour lesquels je travaille. Néanmoins, ce que je réalise au quotidien aujourd’hui, je l’ai appris sur le terrain grâce aux collaborateurs qui ont croisé mon chemin.

Et si c’était à refaire ?  Sans hésitation, mon parcours resterait le même ! Peut-être que j’aurai eu davantage de facilité à trouver un poste dans ce type d’entreprise en sortant d’une école de commerce, mais je n’aurai pas eu ce bagage artistique qui me tenait à cœur plus que tout. Une chose est sûre : si on m’avait prédit que j’occuperai cette fonction un jour, je ne l’aurai jamais cru quelques années en arrière !

Une dernière question pour la route : demain ou d’ici 5 ans, on te retrouvera où ? person holding glass ball

Se projeter n’est jamais un exercice aisé, surtout dans le contexte actuel. Certaines de mes connaissances ayant un bagage égal voir plus important que le mien en terme de diplômes ne trouvent pas le poste idéal qu’ils avaient envisagé. Mais les opportunités existent bel et bien, pour ma part il m’a suffit d’une rencontre, preuve que passer par les sites d’emplois ou le site de l’entreprise n’est pas forcément le réflexe le plus efficace. Idéalement, je me vois évoluer au sein du Monde pour encore quelques temps, et qui sait, je serai peut-être la prochaine directrice commerciale ou communication du groupe !

Nous souhaitons à Ornella de poursuivre une carrière professionnelle riche et épanouissante au sein du Monde. Sa reconversion atypique vous aura peut-être inspirés, rassurés, qu'en pensez-vous ? Connaissez-vous des amis avec un parcours tout aussi inattendu ? N'hésitez pas à vous exprimer sur ce sujet !

URL copiée