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Nous interrogions Reda-Alexandre Chappaz, Fondateur de Cénacle, société spécialisée dans l’écosystème startup en 2016. Et en 2017, quelle est la vision de ce spécialiste ? Il vous dit tout sur ses prévisions de l'écosystème entrepreneurial !
Portrait de l'écosystème startup français et place au niveau mondial
Nous arrivons à un stade de solidification assez avancé pour susciter les intérêts des forces financières et industrielles de première classe. Pas souvent sous pavillon français mais cela devrait changer dans les prochains mois. L’écosystème français est plus stable que celui du Uk qui voit les startups comme une ressource pour produits financiers. L’écosystème français représente également une ressource plus dense en ingénierie complexe que celui de l'Allemagne. Il parait que Paris est le Startup hot-spot Europe, cela se vérifiera par les statistiques, en 2017, sauf surprise de la Suisse :)
Du point de vue des entrepreneurs : quelles évolutions positives et négatives ?
A mon sens, voilà les évolutions positives à venir :
♦ La levée de fonds ne sera plus la seule option pour démarrer son activité. Les banques vont faire leur entrée dans l'écosystème vers la fin de 2017. Il sera alors plus simple de s’endetter pour financer son amorçage et son développement.
♦ L'encadrement législatif du Corporate Venture ou CVC est entré en vigueur. Depuis septembre 2016, j’observe déjà des restructurations ou réorganisations de fonds de grands groupes tirant bénéfice de cette loi qui est purement fiscale (ce qu'attendaient les dits grands groupes). Un amorçage pour le deuxième semestre devrait se faire sentir.
♦ Le Brexit. Les flux financiers asiatiques, du moyen Orient et d'Afrique ne voient plus le UK comme une option pour leurs fonds Tech. Pour le moment ils se rabattent sur la Suisse mais Paris et Lyon devraient prendre un sacré avantage pour la fin de 2017.
Évolutions négatives :
♦ L'élection de Donald Trump. Les fluxs financiers américains pour la R&D hors US vont être au minimum gelés si ce n’est rapatriés. Heureusement nos fonds Tech, en France, sont peu dépendants de ces flux. En revanche c’est un coup dur pour le UK qui cumulera cela avec le Brexit... La silicon valley va surement être un peu marginalisée durant ce mandat. Sans parler de la politique migratoire qui est déjà très restrictive dans ce spot. Mais l’Asie nous fait signe pour les 4 prochaines années. C’est plutôt une bonne nouvelle pour la zone Euro :)
- Issue incertaine pour les Présidentielles françaises - Nous n’allons pas faire de politique, mais tout dépendra de la volonté de poursuivre les dynamiques et les politiques sur les nouvelles économies. Je suis pas inquiet pour le numérique car le secteur est principalement piloté par des directives européennes. Mes notes sur les programmes des candidats dans leur rapport aux nouvelles économies et aux codes économiques de notre écosystème : Primaire de la Gauche: ♦ Manuel Valls = A ♦ Arnaud Montebourg = C+ ♦ Vincent Peillon = B ♦ Benoît Hamon = B++ Autres Partis ♦ Emmanuel Macron = A+ ♦ François Fillon = C- ♦ Marine le Pen = F ♦ Jean-Luc Mélenchon = C+ ♦ Nicolas Dupont-Aignan = D
Et du côté des Business Angel, comment sont perçues ces évolutions ?
La professionnalisation de la chaîne de financeurs de l'écosystème Tech va proposer de nouvelles options aux Business Angels amateurs et confirmés. Que ce soit par l'intermédiaire d’une grande banque ou d’une Fintech, ils se verront proposer de nouvelles opportunités, un sourcing plus efficient et un platforming (Trans.Num des réseaux BA) en forte croissance. Toutefois, cela risque de déplaire aux nostalgiques des réseaux de BA qui aiment se retrouver entre copains pour faire du stressTest de projets et du boarding de PME. Je pense aussi qu'en 2018, le Corporate Venture et les facilités d'endettement vont avoir un effet sur leur dealflow.
Quelles sont les initiatives à mettre en place à court terme, à long terme ?
Comme toujours, il est important de se concentrer sur son produit en le rendant très complexe puis de le rendre le plus modulaire possible pour que le client ait le choix. Et, suite aux résultats des élections US, pour les envies d'expatriation, privilégiez l’Asie (Corée du Sud, Japon, Vietnam), l’Europe (Suisse, Suède, Finlande), l’Afrique (Kenya, Côte d’Ivoire, Maroc) ou Cuba. A court terme : Ne plus envisager le funding via un petit avocat ou un petit cabinet comptable pour des raisons évidentes de coût. Privilégiez des pointures de la Défense qui sont plus accessibles que vous ne le pensez. Ayez une rigueur de gestion de ces fonds avec un professionnalisme des plus drastiques. En clair, la deuxième personne à embaucher est un CFO confirmé. Cela sera excessivement important étant donné l'ampleur du Corporate Venture en Europe. Les entreprises ayant cette rigueur, avec des archives claires et irréprochables, représentent un bien meilleur choix pour les investissements et les rachats. Le problème, c'est que les CFO sont des profils rares car en dehors de notre écosystème. Toutefois, cela tend à changer. Et le Brexit fait son oeuvre. En effet, on prévoit 20.000 RH Banker qui devraient être déplacés à partir de 2018.
2016 : bon ou mauvais cru pour les start-up françaises ?
Je dirais Medium, c'était une année d'écrémage. Comme le dit Maxime Barbier, fondateur de MinuteBuzz:
“Trop de gens deviennent entrepreneur parce que c’est cool. C’est pas cool du tout, c’est juste le chemin le plus dur”.
Moins de startup washing, moins de comm pour vendre un côté fun en interne ou sur les produits / services. On se retrouve entre Geeks et Makers et ça c’est “très cool”.
Quelles ont été les avancées majeures pour l’entrepreneuriat en France en 2016 ?
On est dans une dynamique où les grands groupes ne vont plus rien développer par eux même. Ils vont racheter des génies et leurs boites pour leurs développements industriels. Comme Publicis le faisait en 2000 dans le digital. Donc si tu es bon, que tu prouves que ton produit peut se caler sur un marché d’un grand groupe, banco pour 2020. En plus, avant l'encadrement du CVC, la fourchette de prix des rachats se situait entre 50 et 100 millions d’euros . Aujourd’hui, les avantages fiscaux et la prise de conscience sur la R&D par externalisation vont faire monter cette fourchette : de 70 à 200 millions d’euros vers 2020 puis de 90 à 400 millions d’euros pour 2025. Plutôt sympa ;) mais avec du travail, de l’intelligence et de la rigueur millimétrique dans sa gestion. Merci Réda !