On m’a récemment demandé dans une petite interview, ce qui selon moi faisait la réussite d’un entrepreneur. Réponse : Je vous le dirai quand j’aurai réussi. En attendant, je ne fais que déverser quelques évidences que l’on m’a bien assez souvent répétées :
le travail, la passion, l’humilité. Mais à l’évidence, malgré leur banalité ternaire ces mots prennent tout leur sens au jour le jour. On les enfile un matin comme un costume trois pièces, ils n’existent pas les uns sans les autres, ou plutôt, ils n’ont guère de raison d’être. Mis bout à bout, ce sont les trois notes d’une ode à la réussite. Voici mon interprétation. La passion J’étais en seconde, j’avais 15 ans, le jour où j’ai compris le sens de ce mot. C’était en fouillant dans un dictionnaire pour rendre un exercice d'étymologie à mon professeur de français. Souffrir, éprouver, endurer. Vaste programme. J’étais désabusé. La passion a cela d’irrationnel que l’on demeure passif face à la souffrance.
On ferme les yeux, on l’accepte, et je dirais même qu’on y prend parfois un certain plaisir. Pourquoi ? Parce qu’il y a au delà quelque chose qui en vaut la peine. Une douleur sans laquelle un accomplissement ne serait rien. Qu’admire-t-on chez un alpiniste qui gravit l’Everest sinon sa passion ? C’est cette force mentale qui le motive et qui force son talent. Je veux dire par là sa capacité à endurer l’effort pour aller vers le sommet ! La passion du Christ, un amour passionné, la passion de l’entrepreneur... Il en existe tant d’autres. Suis-je en train de dire que ma vie d’entrepreneur est une souffrance ? Non. Les mots ont heureusement subi l'érosion du temps.
Mais c’est en tout cas une liberté qui suppose l’inconfort et les doutes, qui doit supporter les échecs et les erreurs. Il faut être passionné pour entreprendre, car entreprendre n’a rien de rationnel. C’est une émancipation du bon sens. Le travail De façon assez logique, travail et torture ont la même racine latine. C’est ce par quoi la passion s’accomplit, son moteur. Une passion sans travail, ce n’est qu’un fantasme.
Avez-vous déjà lu la carte d’un restaurant étoilé sans jamais y mettre les pieds ? C’est une sorte de mutilation cérébrale (et je sais de quoi je parle, n’ayant jamais diné dans un restaurant étoilé). J’aime cette phrase de Paolo Cohelo : «Les rêves donnent du travail». Peut-être aurait-il du écrire « Essayer accomplir ses rêves donne du travail ». Car le propre du rêve, c’est son caractère irréel, onirique. Mais en fait, peu importe qu’on le réalise pourvu que l’on fasse tout pour cela. Je suis persuadé que l’accomplissement de soi n’est pas dans la finalité mais dans les moyens que l’on met en oeuvre pour atteindre ses objectifs... le travail.
L’humilité L’humilité enfin, c’est ce retour à la réalité dont on a besoin pour progresser. Rien ne sert de courir derrière un rêve, de se donner tant de mal, si on courre dans la mauvaise direction. L’humilité c’est écouter les critiques, c’est ne pas s’asseoir sur ses lauriers. Nous venons de faire un super événement avec Cup of teach : les journées du patrimoine des start-up. Vraiment, nous sommes très fiers du travail que nous avons réalisé, et je crois que nous pouvons l’être.
On nous a beaucoup félicité pour cela. Simplement, quand nous montrons nos résultats à nos mentors, ils ne se laissent pas impressionner. C’est à peine s’ils nous font un compliment. Et au fond, je crois qu’ils ont raison. C’est une façon de nous dire «whats next ?». Tu as peut-être réussi ça, mais qui te dit que tu réussiras ta journée de demain ? Rien n’est jamais acquis, aucun succès n’est éternel. A force de les écouter, j’en arrive parfois à penser comme un joueur de football que l’on interview après un match : l’important c’est les trois points, et c’est de bonne augure pour la suite et assurer le maintien. Maintenant, on a un match difficile la semaine prochaine contre une très bonne équipe.».
Si l’on devait traduire tout cela en langue entrepreneuriale, cela donnerait : « quand on regarde nos analytics, on voit des signaux encourageants. Maintenant il faut valider un certain nombre d’hypothèses et continuer à aller de l’avant». Tout cela est un peu sans queue ni tête et pourtant, à ces trois mots je voudrais ajouter l’audace. Comme disais Bonaparte : «Avec de l’audace on peut tout entreprendre, on ne peut pas tout faire». Quoi qu’on en pense, c’est déjà pas mal ! Ou du moins, ce n’est pas un mauvais début. Je vous (nous) souhaite bien du courage !