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J’écris ces lignes au terme de ce qui a certainement été ma semaine la plus difficile depuis la création de mon entreprise. Des phases de découragement, il y en avait déjà eu, mais je n’avais jamais été aussi proche de jeter l’éponge. Il est difficile, quand on mène un projet sur le long terme, de faire la part des choses entre la persévérance et l’entêtement. Quand faut-il considérer que la partie est perdue et décider d’abandonner ? Comment à l’inverse se persuader que les phases de doute sont une composante tout à fait normale de la vie d’un entrepreneur, et qu’il est simplement nécessaire de se remotiver ? L’optimisme, ça se travaille. Et je suis particulièrement bien placée cette semaine pour vous donner quelques conseils.
1/ Le retour aux fondamentaux
L’alerte – On ne va jamais y arriver. Vous croulez sous le travail, vous avez le sentiment que tout est devenu impossible, en bref, votre aventure entrepreneuriale devient une lutte de Don Quichotte contre des moulins à vent, et a perdu beaucoup de son sens tant la partie vous semble tout à coup perdue d’avance. La riposte – Se souvenir de ce à quoi on veut arriver. La meilleure parade contre ce type de découragement est la théorie du "worst case scenario". En effet, une phrase d’une amie entrepreneuse m’avait marquée, avant le lancement de sa première boutique de prêt-à-porter, auquel je participais. J’étais paniquée à l’idée du moindre incident ou pire, que la boutique ne permette pas de générer les chiffres attendus par la petite entreprise. Elle était au contraire apparemment très calme. A mon « mais tu n’as pas peur ? », elle avait simplement répondu « tu sais, au pire, on recherchera du travail ». Déconcertant, mais extrêmement efficace. Revenez aux fondamentaux : vous n’allez jamais y arriver certes, mais à quoi ? Que visez-vous pour votre entreprise ? Mieux, que visez-vous, personnellement, en créant cette entreprise ? Que vous apporte-t-elle au quotidien, malgré tous les obstacles et toutes les difficultés ? Souvenez-vous de vos objectifs finaux (l’atteinte de tel objectif quantifiable), plutôt que de vous arrêter aux objectifs intermédiaires, qui ne sont en réalité que des moyens (l’accomplissement de telle ou telle tâche que vous vous étiez assigné). La tête dans le guidon, multitâches, on oublie bien vite de prendre du recul sur le « comment » pour continuer de s’intéresser au « pourquoi ». Rapidement, vous pourrez ainsi vous demander quelles sont vos véritables priorités et réajuster tant vos moyens que vos objectifs. Surtout, vous pourrez vous souvenir que dans le pire des cas, rien ne sera bien terrible. Par exemple, ce n’est pas parce que vous avez manqué une échéance importante pour décrocher un client que votre entreprise est vouée à l’échec (il y d’autres clients possibles). Dans le pire des pires des cas, souvenez-vous que vous avez fait un pari en créant votre entreprise, soit. Vous allez peut-être perdre ce pari, il sera simplement temps d’en faire un autre, pas la fin du monde.
2/ Mieux que la « to do list », la « done list »
L’alerte - Une to do list désespérante. La to do list qui ne diminue jamais, c’est le lot quotidien de l’entrepreneur. A chaque tâche effectuée, il semble que deux viennent s’ajouter. Il m’est même arrivé de mettre sur ma to do list de mettre à jour ma to do list (pour remettre à plat mes priorités, déléguer certaines tâches qui ne l’étaient pas encore, etc.). Etre bien organisé, c’est indispensable. Pourtant, aujourd’hui, vous ne savez plus par où commencer tant l’escalier semble haut à grimper… et qu’il ressemble davantage à un escalator qui descend et que vous remontez en sens inverse. La riposte – La done list La parade est simple : pour y aller marche après marche, conserver des traces de celles que vous avez déjà grimpées. Une fois par semaine et une fois par mois, constatez ce que vous êtes parvenu à rayer de votre to do list en relisant ce qu’on pourrait qualifier de done list. Contrairement à ce que vous pensiez, vous constaterez que n’avez pas « rien fait ». Rien de tel pour être un peu plus indulgent avec soi-même et se réconcilier avec… sa to do list.
3/ L’appel à un ami
L’alerte – Rien ne va et personne ne me comprend Dans les proches, il y a deux catégories : ceux qui vous demandent « et ta boîte, ça marche ? » (que vous avez envie d’étrangler) et ceux qui ne vous en parlent tout simplement pas (incluant ceux qui vous considèrent comme Bill Gates tout comme ceux qui n’en ont strictement rien à cirer de ce que vous faites). Du coup, en pleine phase de découragement, vous préférerez naturellement éviter les premiers. Quant aux seconds, vous hésiterez. Le risque de rester seul dans votre coin à ruminer est proche. La riposte – Appelez un ami ! Appeler un ami aura deux avantages. - D’une part, vous démontrez que vu de l’extérieur, tout ne va pas si mal : quand une journée en fait douze, on oublie souvent qu’à échelle temporelle normale, on avance au contraire assez vite - D’autre part et surtout, vous sortir la tête du guidon pour vous intéresser à autre chose qu’à votre entreprise. Je remercie encore ces deux amis (Glenn, Anaïs) qui, à six mois d’intervalle et en pleines périodes de doutes, m’ont répondu exactement de la même manière, après exposé détaillé de la situation par mes soins : « Mais c’est bon, tout va bien, tu ne pensais quand même pas que ce serait si facile ? Si c’était facile, ce ne serait pas drôle ». Et changer de sujet, parce que ça fait le plus grand bien.
4/ Le recueil d’expériences clients
L’alerte – Le produit ou service lancé ne correspond pas aux exigences qu’on s’était fixées Vous devez lancer, pour une multitude de raisons (ne serait-ce que parce qu’il faut bien y aller à un moment), et malheureusement, malgré tous vos efforts, votre produit ou votre service ne répond pas à l’idée que vous vous en étiez fait. Vous avez à priori deux options : repousser le lancement (et risquer de ne jamais lancer), ou lancer ce produit ou service en connaissance de cause, avec ses qualités et ses défauts… que l’on ne manquera pas de vous signaler. La riposte – Qu’en pensent les principaux intéressés ? Nous avons lancé très rapidement, peut-être trop rapidement, et je ne regrette rien. Si notre plateforme elle-même présente depuis l’origine des tas d’imperfections, elle nous a surtout permis un avantage décisif : dès le lancement, nous avons bénéficié de retours d’expérience utilisateurs à la valeur inestimable, ce qui nous a permis et nous permet d’y apporter des améliorations conformes à leurs attentes. Il est erroné de s’imaginer qu’un produit ou service doit être parfait dès la première tentative. En effet, il sera dans le meilleur des cas parfait au regard de l’idée que vous vous en étiez fait, et ne pas du tout répondre aux attentes de vos utilisateurs, vos clients, dont l’avis importe bien davantage que le vôtre. En période de doutes, tournez-vous avant tout vers eux, ils seront souvent bien plus indulgents que vous ne l’êtes. Je n’ai d’ailleurs à ce jour rien trouvé de plus réconfortant.
5/ (Encore) le retour aux fondamentaux
L’alerte – On est épuisé Vous n’arrivez pas à dormir le soir, d’ailleurs vous dormez mal, et pourtant vous avez les plus grandes difficultés à vous levez le matin : c’est parfaitement normal, vous êtes préoccupé, et la spirale ne risque pas de s’inverser si vous ne prenez aucune mesure. La riposte – Prendre soin de son premier outil de travail Avant même d’appeler un ami, de revenir à nos utilisateurs, de revoir les priorités pour mon entreprise ou de regarder ma done list, je commence toujours par consulter l’état de notre comptabilité. Quand je constate que nous ne sommes pas encore dans le rouge (ou si nous le sommes, dès que j’ai trouvé comment y remédier), la première chose que je fais est d’aller faire une sieste. Oui, le monde et en l’occurrence la situation de votre entreprise ne vont pas s’effondrer parce que vous prenez le temps de dormir, ni parce que vous prenez pour une fois votre dimanche voire votre week-end, ou le temps de voir vos amis. Vous êtes votre premier outil de travail et la première ressource de votre entreprise, ne l’oubliez jamais. Pire, vous épuiser à la tâche va à l’encontre de son intérêt.
Reposez-vous, prenez du recul, vous ne reviendrez que plus efficace.
Photo : Josephine Docenal / Parisian Local